C’est une information qui n’a pas fait beaucoup de vagues. Elle est pourtant très importante en matière d’alimentation. L’an dernier, Reform Paris avait eu l’occasion de soutenir l’élaboration de la niche parlementaire écologiste et notamment de la proposition de loi proposant une nouvelle ère alimentaire. Cette dernière incluait une mesure sur l’interdiction des nitrites très largement portée par la députée des Hauts-de-Seine, Francesca Pasquini.
Les nitrites ne sont jamais loin
Lors d’un débat parlementaire opposant les partisans d’une agriculture traditionnelle à ceux prônant une évolution pour la santé publique, les écologistes ont reçu un soutien surprenant de la part du député Richard Ramos (Député Modem), bien que leurs orientations politiques diffèrent.
C’est le même Richard Ramos qu’on retrouve en pleine trêve des confiseurs dans ce papier publié par Le Monde. On y comprend que la règlementation européenne évolue vers la suppression des nitrites de sodium des aliments destinés aux animaux domestiques. Alors Ramos va au bout de l’idée et décide de faire livrer un paquet de croquettes sans nitrites pour le chien présidentiel Nemo (pour la vidéo, c’est ici) à l’Elysée en décembre. Cette mesure concerne spécifiquement les produits pour animaux, alors que les nitrites restent autorisés dans l’alimentation humaine, notamment dans les charcuteries et jambons. Cela soulève des interrogations sur cette disparité réglementaire.
Les risques associés aux nitrites sont connus
Les nitrites, additifs utilisés pour prolonger la durée de conservation des charcuteries (notamment dans le cas du jambon et d’autres produits provenant de la viande rouge), sont au cœur de cette controverse. Bien qu’ils confèrent une couleur attrayante à la viande, leur transformation en nitrosamines soulève des préoccupations majeures pour la santé publique. En effet, ce sont justement les nitrosamines ont un effet potentiellement cancérigène.
Des études et l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation confirment le lien entre la consommation des charcuteries contenant des nitrites et des risques accrus de diabète et cancer, notamment le colorectal. Ces risques sont bien connus. C’est ce qui a permis à Ligue contre le cancer de mobiliser plus de 560 000 personnes pour interdire l’utilisation des nitrites. En effet, selon cette dernière, ces substances sont responsables de près de 4 000 cas de cancer du côlon et de l’estomac annuellement. Si l’option du « sans nitrites » apparaît de plus en plus dans les étals alimentaires des supermarchés, elle reste limitée dans les charcuteries.
Continuer d’autoriser les nitrites, c’est aller contre la sécurité alimentaire dont on ne rappellera jamais assez qu’elle est un enjeu mondial, affectant des millions de personnes chaque année. L’Organisation Mondiale de la Santé souligne le risque lié aux aliments non sûrs et la nécessité de prévenir, détecter et gérer ces risques pour assurer la santé humaine et la prospérité économique.
Parole à la défense (des nitrites)
Si seulement le monde se divisait en gentils et méchants, tout serait tellement plus simple, n’est-ce pas ? Mais la réalité, c’est cette défense farouche des charcutiers traiteurs qui rappelle le rôle essentiel des nitrites contre le développement des microbes et qui permettent donc de prolonger la durée de vie de la viande. Les antispécistes trouveront cette phrase caustique, la « durée de vie » d’un animal mort. Le remède des nitrites est-il pire que le mal de la viande qui pourrait être avariée plus rapidement ? Et existe-t-il une voie intermédiaire pour savourer de la viande sans craindre les microbes que les nitrites repoussent, tout en évitant les risques liés à ces additifs ? Est-ce que la solution serait simplement la réduction de ces substances pour obtenir une viande moins transformée ?
Aujourd’hui, entre les croquettes pour chien et les arguments des scientifiques ayant contribué à la proposition de loi d’avril dernier, on réalise que des alternatives sans nitrites existent déjà. Certes, elles requièrent des études supplémentaires pour une reproduction à grande échelle, mais changer nos habitudes culinaires prendra du temps dans nombre de nos régions. Néanmoins, embrasser cette voie semble de plus en plus nécessaire. Le progrès technique a franchi ce paradoxe et nous offre la chance de savourer demain de la charcuterie (avec modération, évidemment !). Alors, pourquoi ne pas s’embarquer dans cette aventure sans nitrites et approuver rapidement une mesure politique pour officialiser cet objectif ?