Portée par le député écologiste Sébastien Peytavie, la proposition de loi visant à instaurer un arrêt de travail en cas de règles douloureuses été rejeté en Commission à l’Assemblée nationale le 27 mars dernier. Pourtant, il s’agit d’une mesure plus que nécessaire. On vous explique pourquoi.
Quelques chiffres sur la santé menstruelle en France
Aujourd’hui en France, une personne menstruée sur deux souffre ou a déjà souffert des règles douloureuses. Actuellement, c’est seulement le 10% des femmes qui a été diagnostiqué comme atteinte d’endométriose, cependant, la réalité est bien différente. Les douleurs incapacitantes, dues aux règles, font partie du quotidien de la majorité des femmes et des personnes en âge de procréer. Selon les dernières statistiques, 65% des femmes actives a déjà été confronté à des difficultés liées aux règles au travail et 14% d’elles est régulièrement forcées de s’absenter.
En effet, on ne retrouve pas les dysménorrhées seulement chez les femmes qui souffrent d’endométriose, mais ces douleurs sont souvent liés à d’autres pathologies comme le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK), ou encore un fibrome ou des troubles dysphoriques prémenstruels.
La banalisation de la douleur menstruelle au sein de la sphère professionnelle est encore très ancrée dans la société et elle dérive souvent de la méconnaissance du sujet. Cette proposition de loi vise non pas seulement à instaurer la possibilité d’un arrêt de travail pour les personnes ayant des règles douloureuses. Elle est aussi et surtout témoin de la nécessité de sensibiliser le monde du travail et la société en général sur des questions liées à la santé menstruelle. Il est ainsi urgent de commencer à considérer la santé menstruelle et gynécologique un sujet de santé publique et d’intérêt général.
Arrêt menstruel et non pas congé menstruel
Particulièrement important est le choix des mots au sein de cette proposition de loi. Il faut noter qu’on ne vise pas à instaurer « des congés menstruels ». Ce n’est pas l’esprit de la loi. L’idée est justement de promouvoir la mise en place d‘un arrêt menstruel suivant les mêmes modalités d’application de l’arrêt de travail commun, pris en charge par l’assurance maladie. Les menstruations incapacitantes peuvent être en effet constatées par le médecin traitant, la sage-femme ou encore le médecin spécialiste et l’arrêt ouvre le droit à 13 jours sur une année de travail.
L’instauration d’un arrêt menstruel en cas des règles douloureuses et incapacitantes ne laisse pas de place aux doutes malveillants sur les potentiels abus qui découleraient de la mise en place de ces mesures. Il est important de mentionner qu’il s’agit d’un système souple de mise en œuvre, qui ouvre également le droit au télétravail pendant les jours particulièrement handicapants.
Une mesure de santé publique promouvant l’égalité professionnelle
Adopter une proposition de loi sur la santé menstruelle et gynécologue en France pose les bases pour la promotion de l’égalité de genre dans le monde professionnel et permet une sensibilisation plus accrue sur un thème fondamental de santé publique.
Egalité professionnelle accrue
Tout d’abord, il s’agit d’égalité professionnelle. Si les discours conservateurs de la droite revendiquent le contraire, il est fondamental de souligner que dans cette mesure, il n’y a pas de différence de traitement au travail puisqu’on ne parte pas de la même situation. Dit de façon simple, les hommes n’ont pas des règles. Cependant, la non-instauration de ce système engendre, de facto, des discriminations au travail. En effet, un nombre important des femmes doit gérer des douleurs aiguës causées par la menstruation. Cela crée souvent des situations inconfortables et de vulnérabilité vis-à-vis des autres collègues et des tâches à gérer dans le quotidien professionnel.
Mesures concrètes de sensibilisation
De façon complémentaire, la proposition de loi portant à la reconnaissance de la santé menstruelle et gynécologique dans le monde du travail prévoit des mesures concrètes de sensibilisation du milieu professionnel. Il s’agit d’un point important qui réitère l’esprit d’une loi qui vise à amener plus de conscience et connaissance sur les problèmes de santé en lien avec les menstruations et leur prévention. En pratique, cela est suscité par des cycles de sensibilisation (art 5) ouverts à tous les salariés et l’intégration du sujet dans les négociations collectives (article 4) par exemple.
Enfin, une partie de la classe politique reste hostile à ce texte. Effort de pédagogie encore nécessaire ou relents de patriarcat ? Sébastien Peytavie nous donne l’occasion d’ouvrir le débat et d’accéder à un nouveau champ de bataille dans la lutte contre les discriminations liées à l’état de santé menstruelle et gynécologique et cela doit faire partie des priorités de l’agenda politique dans les mois à venir.